Affaire lotofr.com, La Française des Jeux contre J-C M., Litige n° D2006-0330
La Française des Jeux vient de récupérer le nom de domaine lotofr.com, devant le centre d’arbitrage et de médiation de l’OMPI. Ce litige répond à la question de la fusion d’une marque notoire avec la désinence d’un .fr, tout en jugeant également des propos portant atteinte à la réputation du Requérant.
Parties et nom de domaine
Le Requérant est La Française des Jeux, Boulogne Billancourt, France, représenté par Inlex Conseil, France.
Le Défendeur est J-C M, La Gaude, France.
Le litige concerne le nom de domaine
Les faits
Après avoir constaté l’existence du nom de domaine lotofr.com, réservé au nom du Défendeur, le Requérant a pris contact avec ce dernier, par courrier, le 15 juin 2005, et par l’intermédiaire de son mandataire le 28 décembre 2005, afin d’en obtenir le transfert à l’amiable. Dans sa réponse du 10 juillet 2005, le Défendeur indiquait que “le site
Le nom de domaine litigieux héberge un site actif dont le contenu est ainsi décrit par le Défendeur: “Le site ne parle que du loto français et propose la consultation des statistiques liées aux tirages passés ainsi que des systèmes de réduction permettant de jouer plusieurs N° en les associant intelligemment afin d’obtenir une garantie minimale. Un service supplémentaire est proposé à ceux qui le veulent: la réception des résultats le soir même du tirage dans une boîte email”.
Argumentation des parties
A. Requérant
Le Requérant invoque à l’appui de sa plainte de nombreuses marques composées du terme LOTO dont les droits de marque suivants :
– LOTO (marque figurative) n° 99782889 déposée le 25 mars 1999;
– LOTO (marque figurative) n° 662389 déposée le 22 avril 1983 et régulièrement renouvelée.
Le Requérant estime que le nom de domaine
Le Requérant expose par ailleurs que le Défendeur n’a aucun intérêt légitime sur le nom de domaine litigieux, lequel a été enregistré et est utilisé de mauvaise foi. Concernant ce deuxième point, le Requérant insiste notamment dans sa plainte sur la nationalité française du Défendeur, lequel ne pouvait raisonnablement ignorer l’existence de la marque française LOTO.
B. Défendeur
Le Défendeur conteste quant à lui l’argument selon lequel le nom de domaine
Discussion et conclusions
Identité ou similitude prêtant à confusion
La Commission relève en premier lieu que le Requérant a dûment établit les droits qu’il détenait sur le terme LOTO à titre de marque, ce qui n’est pas contesté par le Défendeur.
Le terme “LOTOFR” est constitué de la racine “LOTO” et de la désinence “FR”.
S’il est vrai que le Requérant n’est pas titulaire d’une marque identique au nom “LOTOFR”, ce nom peut toutefois être considéré comme faisant partie de la famille de marques “LOTO” appartenant au Requérant et conduire indûment le public à leur attribuer une origine commune.
On relèvera en effet que dans le nom “LOTOFR” pris dans son ensemble, la racine “LOTO” prédomine, de par sa taille et sa position d’attaque. L’adjonction de la désinence “FR”, indication descriptive comprise par tout internaute comme une référence au domaine “.fr” correspondant au code pays désignant la France ou, comme le précise le Défendeur comme une indication du fait que le site actif sous le nom de domaine
Dans ces conditions, le nom de domaine
Droits ou intérêts légitimes
Le Requérant indique que le Défendeur n’a jamais utilisé la marque LOTO, ni antérieurement ni postérieurement à l’utilisation qui en est faite par le Requérant, n’a jamais été connu sous la dénomination LOTO, n’a jamais enregistré de marques LOTO ou plus largement de combinaisons comprenant la dénomination LOTO et n’a en aucune manière été autorisé par le Requérant à utiliser la marque “LOTO” à quelque titre que se soit ou à réserver le nom de domaine LOTOFR.COM..
Dans la mesure où le nom de domaine a été utilisé par le Défendeur à des fins lucratives telles que présentes ultérieurement sous paragraphe 6C, ce qui selon la Commision administrative ne constitue pas un usage du nom de domaine en bonne foi, et en l’absence de preuve contraire des droits, ou un intérêt légitime sur le nom de domaine
Enregistrement et usage de mauvaise foi
Selon le paragraphe 4(b) des Principes directeurs, la réalisation de l’une des circonstances suivantes est susceptible d’établir que le nom de domaine a été enregistré et utilisé de mauvaise foi :
– Les faits montrent que le Défendeur a enregistré ou acquis le nom de domaine essentiellement aux fins de vendre, de louer ou de céder d’une autre manière l’enregistrement de ce nom de domaine au Requérant qui est le propriétaire de la marque de produits ou de services, ou à un concurrent de celui-ci, à titre onéreux et pour un prix excédant le montant des frais qu’il peut prouver avoir déboursé en rapport direct avec ce nom de domaine,
– Le Défendeur a enregistré le nom de domaine en vue d’empêcher le propriétaire de la marque de produits ou de services de reprendre sa marque sous forme de nom de domaine, et est coutumier d’une telle pratique,
– Le Défendeur a enregistré le nom de domaine essentiellement en vue de perturber les opérations commerciales d’un concurrent, ou
– En utilisant ce nom de domaine, le Défendeur a sciemment tenté d’attirer, à des fins lucratives, les utilisateurs de l’Internet sur un espace Web ou autre site en ligne lui appartenant, en créant une probabilité de confusion avec la marque du Requérant en ce qui concerne la source, le commanditaire, l’affiliation ou l’approbation de son espace ou espace Web ou d’un produit ou service qui y est proposé.
Il ressort clairement des documents fournis par le Requérant que sa marque LOTO bénéficie d’une notoriété très élevée sur le territoire français. En conséquence, le Défendeur, personne physique de nationalité française et résidant en France ne pouvait ignorer à la date de la réservation de son nom de domaine
Les déclarations du Défendeur dans son courrier du 10 juillet 2005, ne laissent aucun doute à cet égard, cette connaissance résultant par ailleurs des termes de la réponse déposée par le Défendeur auprès du Centre le 11 avril 2006, lequel fait valoir que le site actif sous le nom de domaine
Cette connaissance étant établie, il ressort de la plainte déposée par le Requérant et de la lettre du Défendeur du 9 octobre 2005, que le site
A cet égard, dans sa réponse déposée auprès du Centre le 11 avril 2006, le Défendeur invite la Commission à consulter la rubrique “Coup de gueule” figurant sur le site
– Pourtant, dans certains cas, La Française des Jeux se donne le droit de ne pas redistribuer ces sommes. Elle « confisque » certain gros lot pour pouvoir en faire des « super cagnotte ».
– Obligation de jouer aux deux tirages du jour : De tous les changements apportés depuis 1976, celui-ci est certainement le plus « pervers ».
Un tel comportement consistant à réserver un nom de domaine reproduisant la marque de la Requérante et à diriger de ce fait les internautes sur un site contenant des propos portant atteinte à la réputation de la Requérante doit également être pris en considération s’agissant de l’appréciation des éléments constitutifs de mauvaise foi caractérisés ci-dessus.
Décision
Martine Dehaut, l’expert unique, décide que pour les motifs exposés ci-dessus, et en application du Paragraphe 4(i) des Principes Directeurs, et du Paragraphe 15 des Règles, la Commission administrative ordonne le transfert du nom de domaine
Pour en savoir plus :
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